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Message par Dallan Mael Mer 20 Juil - 0:47

La fin. Point final. Dernière goutte d'encre sur une page blanche. C'est ce qu'est sensée représenter la mort, non ? Après l'impact chaotique d'un tas de ferraille sur sa pâle personne. Quelques cris retentissant, mais que jamais il n'entendit, déjà loin d'eux. Le choc si brutal l'avait tué sur le coup. Ses prunelles étaient restées écarquiller, dans l'improbable événement d'une journée si mal commencée, d'un tissage de Parques terminé. Mais ces trois vieilles femmes s'imaginaient-elles être un jour doublées dans leurs travail d'orfèvre ? Sans doute que non. Qui d'autre qu'un déjà initié pourrait d'ailleurs l'imaginer ? Même Dallan ne pu savoir... Et jusqu'à son arriver dans ce lieu improbable, il ne sut.

Il y eut comme un passage à vide. Tourbillon déchainé mais pourtant calme. Indescriptible. Incapable de respirer pendant une éternité lui sembla-t-il, alors que le tout ne dura qu'une seconde, avant qu'il n'ouvre ses deux orbes nacrées sur un monde inconnu. Assit sur le sol, les mains figées dans l'herbe grasse, Dallan ne saisissait pas ce qu'il venait de lui arriver. Il lui fallut d'ailleurs un moment pour se rappeler qu'il était mort. Tout lui revint comme un flash. Le bruit du klaxon, l'impact, le vide, ça. Il passa une main tremblante sur son visage, encore secoué par la chose. Tout du moins, il était toujours aveugle. Le voile noir devant ses yeux obstruait parfaitement sa vision de ce nouvel endroit. Mais loin d'être le même qu'avant, il sentait au fond de lui une sensibilité à ce qui l'entourait, le gagner. L'herbe sous ses doigts était chatouilleuse, coquine, agréable. La brise qui caressait son visage, donnait l'impression de lui souffler un message, une invitation à se lever.

Pendant un long moment pourtant, Dallan resta assit au milieu de ce grand rien. Il n'avait aucun point de repère, ne savait pas dans quelle direction aller. Il craignait même de retomber aussi sec en se levant. Dans un geste nerveux, il se mordit la lèvre. C'était angoissant d'être soumit à l'invisible. Comme une sensation oppressante, alors qu'il était clair que l'adolescent se trouvait au milieu d'un espace ouvert, très champêtre même.

Doucement, il finit par prendre son courage à deux mains. Genoux à terre, il toucha le sol, ses doigts s'avançant dans l'herbe, jusqu'à rencontrer une racine. Un arbre ? Parfait, pensa-t-il. S'il y avait un arbre, il pourrait s'y appuyer, y trouver son point d'ancrage. A tâtons, l'aveugle chercha l'aboutissement au tronc. Mais fut foncièrement perplexe quand à mesure d'avancer à quatre patte, un peu bêtement, alla-t-il s'imaginer, il ne faisait que suivre cette racine, grossissant, encore et encore. Dans quel sorte d'endroit avait-il donc put atterrir, pour qu'un arbre se soit marqué si largement dans le sol.

A mesure qu'il sentait les veines florales se propager sous ses doigts, Dallan eut l'impression que l'arbre communiquait avec sa personne. Pas comme l'aurait fait un homme avec un autre. Non, d'une manière plus mystique, plus douce, pleine de sérénité. Automatiquement il s'y laissa aller, offrant toute sa confiance à ce... Cette force ? Aucune idée. Il n'y avait pas de mot à placer là-dessus. Au moins, eut-il le bonheur de se retrouver finalement debout, les deux paumes contre un tronc gigantesque. Il y appuya un instant son front d'ailleurs, rassuré par cette étrange présence, avant d'oser longer l'écorce, incrédule quand au fait qu'il soit si large.

De sa mort, jusqu'à son arrivé là, ici... Dans cet endroit en bref, Dallan était en plein mystère. Géographiquement, il aurait été incapable de déterminer le lieu. Europe, Afrique... Amazonie ? Il n'en savait fichtrement rien. Il commençait même à se demander s'il était encore sur la Terre. L'Arbre contre lequel il avançait, lui soufflait que non, du moins le crut-il en tout cas.

Ses pensées divaguaient ainsi au rythme de l'écorce informe, jusqu'à ce qu'il sente un renforcement sous ses doigts. Il fronça les sourcils. Qu'est-ce que c'était encore que ça ? Se demanda-t-il brièvement, laissant courir ses mains le long de ce qu'il se représenta être comme une entrée. « Une porte dans un arbre ? » fit-il d'une voix inaudible, la gorge sans doute nouée par le stress de l'inconnu.

Incapable de reculer après avoir crapahuté à quatre pattes et marché le long d'un tronc, il décida de pénétrer dans ce nouvel espace. La première chose qui le traversa, fut une chaleur rassurante. Bizarre, pensa-t-il, en s'avançant, deux doigts s'appuyant encore contre le bois. Son autre main jaugea l'étendue devant lui. Vide, c'était vide. Et comment pourrait-il s'avancer là-dedans lui, le pauvre gamin atteint de cécité ? Il n'avait vraiment pas envi de quitter son mur, pour s'élancer dans un océan sombre. Une moue gagna alors ses lèvres, tandis qu'il faisait quelques pas sur le côté, suivant son point d'ancrage.

Bien sûr, il était dans l'impossibilité de d'évaluer la présence d'un obstacle au sol. Aussi, finit-il sa marche, son pied se prenant dans on ne sait quoi trainant sur le sol, le faisant s'écrouler lamentablement, renversant au passage une pile d'un quelque chose par terre. « Outch... » lâcha-t-il plaintivement, le nez dans... Dans une pile de livres ? Ses doigts vinrent caresser les contours, reconnaissant parfaitement la texture des pages. Là, tout s'emmêla dans sa tête. Il était dans un arbre, oui ou non ? Et si oui, que faisait donc des bouquins là ? Il ne comprenait plus rien du tout pour le coup...
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Message par Botan Mer 20 Juil - 1:30

    Assise sur une chaise, ses pieds blancs et nus posés sur le bureau, Botan mâchonnait le long bâton de sa pipe avec avidité. Son vêtement retombait machinalement dans son dos, dévoilant des épaules presque maigres. Ses cheveux blonds étaient attachés en un chignon indescriptible et sans harmonie. Des mèches lui retombaient un peu partout sur le visage, elle les repoussait avec un geste lent de la main. Son regard était fixé sur un point immobile au dehors. Elle clignait lentement des yeux tout en observant avec un regard remplit d’intensité à travers la petit fenêtre devant son bureau l’extérieur de la pièce. Sa pipe n’était pas allumée mais elle en avait l’envie. Le tabac était pour elle un très bon moyen de se détendre. Même si elle n’était pas du tout du genre stressée. Mais elle avait besoin de ça, c’était son petit plaisir. Elle faisait rouler le tube dans sa bouche et regardait dehors avec sérieux. L’envie d’aller fumer tranquillement lui tiraillait l’esprit voilà quelques secondes, mais quelque chose, ou plutôt quelqu’un l’en avait empêché. Elle soupira et se gratta la tête. Beaucoup de nouveaux étaient arrivés aujourd’hui, elle avait pensé être débarrassée de sa tâche pour le reste de la journée. Mais elle se trompait. Du bout du pied, elle déplaça une petite pile de livre en équilibre sur son bureau qui gâchait sa vue.

    Tout n’était que bazar dans sa pièce. La grande majorité de l’espace était occupé par de grandes piles de livres, tous plus vieux les uns que les autres, qui ne tenaient debout que grâce au fait qu’elles étaient appuyés, pour la plupart, contre le mur. Des plumes gisaient un peu partout sur le sol, accompagnées par quelques feuilles volantes et petits pots d’encre noire. En plus de celle sur laquelle Botan était assise, trois chaises, dont une renversée, étaient disposées dans la pièce ainsi qu’un tabouret. La pièce en question était plutôt grande, elle semblait faire la largeur du tronc. De grandes étagères trônaient dans le fond de la pièce, elles se courbaient sous le poids des nombreux grimoires qui se trouvaient sur chacune d’elles. L’atmosphère était agréable. Chaude et rassurante. On s’y sentait un peu à l’étroit parmi tous les objets disposés n’importe comme, mais à voir la jeune femme se déployer d’une manière ferme sans pour autant faire tomber la moindre chose, aidait à se sentir plus à l’aise. La lumière était brune et chaude et complétait cette sensation de bien-être qu’on ressentait en traversant la porte.

    Lorsque la porte s’ouvrit, seulement la tête de Botan bougea. Elle observa la poignée ronde qui tournait doucement sur elle-même avec un léger sourire sarcastique. Enfin se dit-elle. Lorsqu’elle aperçut enfin l’objet de ses observations pénétrer dans son bureau, elle haussa un sourcil. Un aveugle. Voilà longtemps qu’elle n’en avait pas vu dans l’Arbre. Drôle de choix pour un monde des livres. Mais bon, ce n’était pas à elle de décider. Elle ferma les yeux et se leva en silence en l’entendant tomber, tout en sachant qu’il venait de se prendre les pieds dans la première pile qui se trouvait devant la porte. Elle posa sa pipe. D’une main, elle saisit le tabouret qui se trouvait non loin et s’avança vers le nouveau venu. Le bas de son vêtement trainait sur le sol provoquant un doux bruissement. De l’autre main, elle saisit avec douceur mais avec force un bras du jeune garçon et le fit assoir sur le tabouret. Tout en silence, elle approcha son visage du sien, assez près, comme elle aimait le faire. La jeune femme observa durant quelques secondes le visage du nouveau venu. Elle s'attarda sur ses yeux et se redressa de toute sa longueur. Elle sourit paisiblement, recula pour s’assoir sur une pile de livre et parla d’une voix lente.

    « Bonjour, je suis Botan, je te souhaite la bienvenue dans ce monde. Je suppose que tu as beaucoup de question à me poser. Mais sache que le temps t’aidera à y répondre. Maintenant que tu es ici, rien ne presse..»
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Message par Dallan Mael Mer 20 Juil - 4:34

Des livres, pleins de livres. Une tonne de papier répandue autour de lui, il pouvait à présent le sentir. Sous son corps il y en avait d'autres, éparpillés parce qu'il était tombé comme un imbécile. C'était ça le bruit sourd qui avait précédé sa chute. Combien en avait-il renversé ? Beaucoup, au vue des différentes textures de couvertures, sur lesquelles se baladaient ses doigts. Le nez encore plongé dans un calepin ouvert, il cherchait à comprendre le pourquoi du comment. Son esprit s'activait vivement à trouver une espèce de logique architecturale à laquelle se raccrocher. L'alentour lui était trop sombre, impénétrable. Au moins le sol lui offrait une sorte bouée de sauvetage. Il n'avait pas à craindre le mal aise d'un trop grand rien, les courbes des livres se devinant aisément, ajouté à cela, l'odeur de vieux cuir et des pages jaunis, si réel, si rassurant.

Il s'apprêtait à se relever, reprenant un brin de contenance, quand un bruit sur sa gauche lui fit hausser un sourcil. L'impression qu'on ôtait quelque chose du sol et un souffle d'air qui se soulève associé au murmure d'une étoffe glissant par terre, parvint près de sa personne encore étalée sur le sol. Dallan analysait très bien son environnement quand il se concentrait assez. Et la tiédeur de la pièce l'y aidait en un sens. Ne plus avoir la vue ne signifiait pas qu'il se renfermait en autiste sur son monde. Au contraire, il le percevait encore mieux. L'ouïe, le toucher, deux sens qui s'étaient grandement développer avec les années. Il pouvait différencier les démarches de deux personnes. Reconnaitre le couinement d'une paire de basket neuve ou percevoir, via le timbre de son interlocuteur, s'il lui voulait ou non du mal. Quelque mauvaises langues diront sans doute que c'est une particularité bien inutile. Qu'est-ce qu'on en a à faire qu'il fasse la différence entre un son ou un autre. Quand on voit, ne se pose pas ces questions. Mais pour lui, garçon atteint de la cécité, ça a son importance justement. C'est un pas de plus dans l'indépendance, une reconnaissance envers soi-même, l'amour-propre qui remonte. Alors oui il y tient à tout ces petits bruits.

Une main lui attrapa le bras, le sommant gentiment de se lever. Dallan se demanda qui était donc la personne le touchant. Il aurait peut-être put spéculer sur son sexe, en devinant la finesse de ses doigts, si la manche de son gilet ne faisait pas barrière au contact qu'il aurait concrètement eut.
Appuyant une paume sur le sol, il se releva assez gauchement, avant que l'inconnu ne le fasse asseoir sur un tabouret. Il y appuya ses mains, réflexe de celui qui aime sentir ce qui l'entour et regarda droit devant, sans pourtant voir.

Les prunelles fixes, il senti quelque chose l'approcher, un léger souffle venant chatouiller son visage. Une odeur de tabac lui monta alors au nez, tandis qu'il fronçait légèrement les sourcils. La personne lui faisant face devait aimer ça, fumer... Pourtant, contrairement aux vapeurs de nicotine et de cigarette en général qu'il avait put humer de son vivant, là, l'odeur se dévoilait plus douce, moins agressive, bien que restant âcre sur les bords.

Bien évidemment, Dallan ne se rendit pas compte de la distance à laquelle le visage de l'autre s'était approché. Il se contentait de rester sagement assit sur le tabouret, les deux mains dessus. Même s'il avait voulut fuir, il en aurait été incapable, à moins d'avoir une chance hors du commun. Aveugle, il aurait vite fait de se prendre une deuxième fois les pieds dans les livres trainant. En parlant de ça, il espérait ne pas être réprimandé. Vraiment... Il n'avait pas fait exprès.

Il entendit un nouveau bruit, signalant que l'autre c'était assit sur quelque chose. Le son, s'il avait du le décrire, aurait été celui de plusieurs pièces de cuirs que l'on empile l'une sur l'autre, posant entre, une sorte d'étoffe sèche. Papyrus... Simple papier même. Peut-être la personne avait-elle posée son derrière sur une autre pile de livres ? Bon sang qu'il aurait rêvé qu'on lui décrive la pièce dans son ensemble, plutôt que de continuer à partir sur de vagues hypothèses.

Dallan se montra incapable de retenir le léger sursaut de surprise qui l'anima, quand l'inconnu se mit à parler. Elle se présenta comme Botan. Une femme, avec une voix aux intonations plutôt douces, tout en se montrant saupoudrer d'une touche de mystère et... d'ennui. Elle supposa qu'il avait de nombreuses questions. C'était un fait, mais jamais il ne les lui poserait de vive voix. Il était trop intimidé et peu causant en général. De toute manière, selon ce qu'elle lui dit, le temps ferait les choses. Il avait du mal à saisir ce qu'elle racontait. Elle parlait d'un monde. Mais pas la Terre... Non, pas la Terre, ça se sentait que c'était quelque chose de supérieur, plus mystique.

Il cligna des yeux, lentement, gardant le silence pour un temps, tandis qu'il faisait le trie dans sa tête. Déjà, il était mort. C'était dur à concevoir, mais implacable pourtant. Deuxièmement, il était dans un lieu qui n'était pas de son monde. Ça, il s'en doutait. L'arbre qu'il avait frôlé, n'avait rien qui le rapproche du fait de l'homme. Et enfin, il était dans une pièce, présentée comme un point d'interrogation géant dans sa tête, en face d'une femme lui inspirant de la sympathie. Bien. Maintenant, il avait besoin de savoir une seule chose, avant de définitivement perdre pieds.

« Est-ce que... » commença-t-il tout doucement, avant de reprendre d'une voix un peu plus forte : « Est-ce que vous pouvez au moins me décrire la pièce ? »

S'il y avait une question qu'il pouvait poser, outrepassant sa timidité, c'était bien celle-ci. Il avait besoin de remplacer cet océan ténébreux, par un lot d'informations, même succinctes. Ça serait à même de le rassurer, de lui donner de quoi anticiper sur les objets présents. Tout juste savait-il qu'il y avait une grande présence de livres, le reste... Aucune idée. Peut-être, avant de lui faire part de sa petite question, aurait-il fallut qu'il s'excuse pour avoir mit le bordel dans la pièce. Enfaîte, il ne se doutait même pas que l'espace était déjà à la limite du capharnaüm.

« … Et je suis désolé d'avoir mit le désordre. » souffla-t-il tout bas, désolé, son regard délavé, posé dans celui de Botan, sans qu'il ne s'en rende compte.

Encore secoué par tous les évènements et l'arbre ayant joué un rôle rassurant dans son entré ici, Dallan n'était pas dans l'idée de se poser trop de questions sur sa nouvelle condition. Il était plus intéressé par le lieu en lui-même, que sa propre personne. C'était là, le doux aspect de sa personne. D'avantage habitué à écouter les autres, plutôt que lui-même, il était tout à fait capable de se mettre de côté.
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Message par Botan Mer 20 Juil - 11:46

    Un aveugle. Vraiment, elle ne comprenait pas ce choix. Elle n’avait jamais vraiment compris les choix de l’Arbre et les remettait souvent en question mais à vrai dire, ce n’était pas son rôle. Elle avait autre chose à faire, et d’autres choses à penser. En tout cas, si ce jeune homme avait été choisi, c’est bien parce qu’il y avait une raison spécifique et unique en son genre. Il semblait si perdu. Si fragile. Une proie quelque peu facile pour des gens mauvais. C’est sûrement pour cela qu’il était arrivé ici. Son apparence chétive et vulnérable avait dû séduire l’âme de l’Arbre. Elle se demandait bien comment il avait fait pour venir ici. Il était mort. Elle pouvait le sentir. Après tant d’année à trier les nouveaux arrivants, elle pouvait depuis longtemps distinguer les morts des vivants dès qu’ils arrivaient à l’Arbre. Comment était-il mort. Elle aurait aimé le savoir. Mais cela ne la concerne pas. Peut-être l’Arbre lui intimera-t-il à un moment donné, mais pour l’instant, au fond, elle s’en fichait un peu. Tout ce qui lui importait, était de savoir comment ce petit bout d’homme allait réussir à se débrouiller dans ce monde. Elle pourrait le confier à un Guide. Beaucoup d’en eux prendraient cette tâche à cœur et serait aux petits soins avec lui. Voire trop. Son regard qui s’était envolé vers le haut de la pièce pendant qu’elle parlait, redescendit sèchement sur le visage du jeune homme.

    Il était intrépide. A être entré dans son bureau comme il l’a fait, vraiment, il fallait avoir du courage. Mais est-ce une qualité lorsque l’on est aveugle, ou plutôt une tare qui peut nous apporter des ennuis à long et à court terme. Peut-être refusera-t-il cet aide. Les personnes portant un handicap de ce genre ont tendance à être assez fiers généralement. Et ils refusent souvent toute aide pour ne pas inspirer la pitié. Mais bon, peu importe. S’il voulait se débrouiller seul, qu’il fasse. De toute façon, il ne le resterait pas bien longtemps, seul. La jeune femme le regarda longuement sans expression au fond des yeux à part son habituelle froideur mesurée. Elle sentait dans l’air qu’il était assez secoué par ce qu’il venait de lui arriver. Une certaine peur se lisait sur son visage. Ou une appréhension. Mais c’était absolument compréhensible. Beaucoup d’arrivants mettaient du temps à comprendre. C’est assez dur, en effet, lorsque l’on vient de l’autre côté de s’habituer à l’idée de sa mort puis à l’idée de l’éternité qui attend devant nous. Ceux qui s’adaptaient le plus vite étaient les visiteurs. Sûrement parce qu’ils avaient encore une accroche quelque part. Une chose, une vérité pour se rassurer. Pour ceux qui arrivaient définitivement ici, la chose était plus complexe. Tous les points de repères initiaux avaient disparus et il fallait s’en refaire de nouveaux dans un monde inconnu. Elle l’écouta parler et laissa passer un moment de silence.

    « Le plafond est rond. Les murs sont faits de bois. Et le sol est de la terre battue. Au plafond, de petites chaines pendent avec au bout, de légères petites lampes à huile. Sur les murs de nombreuses feuilles sont épinglées avec des petites pointes. Il y’a des étagères dans le fond de la pièce. Un rideau qui sépare d’une autre partie. Deux petites fenêtres arrondies sur le haut. Un bureau en dessous de l’une d’elle. Et des livres. Partout. Absolument partout… »

    Tout en décrivant son bureau, elle suivait des yeux les objets ou les parties qu’elle décrivait. Depuis les siècles qu’elle avait passés ici, rien n’avait vraiment changé. Elle n’aimait pas le rangement, mais encore moins la nouveauté. Surtout lorsque l’on dérange ses habitudes. Certains livres n’avaient pas bougés depuis de nombreuses années. Mais il n’y avait pas de poussière. Non pas parce que Botan était une as du ménage, non, bien au contraire, mais la poussière n’existait pas dans l’Arbre. Il n’y avait pas de saleté à part cette que provoquait les humains. Esquissant un rictus, elle tourna la tête vers le garçon qui, à présent, s’excusait d’avoir fait tombé la pile de livre. Elle rigola doucement. La grande majorité des personnes qui venaient dans son bureau faisait forcément tomber quelque chose. La pièce était assez grande, mais remplie de chose en équilibre. Seule Botan ne faisait rien tomber. Elle avait l’habitude, c’était sa manière de vivre.

    « Ne t’inquiète pas mon garçon, ça n’a pas d’importance. Les livres doivent être chahutés de temps en temps. Sinon, ils s’endorment tu sais. »

    Alors qu'elle parlait, elle se leva avec lenteur et se dirigea vers son bureau. C'était sûrement le pire endroit de la pièce, on ne voyait pas grand-chose de la table en elle-même. Tout s'amoncelait. Mais en même temps, tout semblait étrangement à sa place. Comme si c’était naturel qu’une chose soit ici. Botan dégagea un gros livre d’en dessous plusieurs plumes plus ou moins abîmées. Le livre en lui-même semblait beaucoup plus vieux que les autres. Pourtant, la plupart des livres apparaissaient comme extrêmement âgés. C’était le registre de l’Arbre à Livre. Gros et imposant livre qui paraissait assez lourd, mais que la jeune femme portait avec habitude et légèreté. Elle prit la chaise qui trônait derrière le bureau et s’en retourna vers le jeune homme. Elle s’assit et poussa du pied une pile de livre pour qu’elle puisse servir de table où poser le vieux livre.

    « Alors, as-tu des questions ? Avant tout, je voudrais savoir comment tu t’appelles et l’âge que tu as. »

    Elle se pencha en avant pour prendre au sol une plume et une petite bouteille d'encre. Une mèche de ses longs cheveux entra en contact avec une des mains du jeune garçon appuyé sur le tabouret alors qu’elle farfouillait sur le sol. Puis elle se redressa d’un coup, croisa ses jambes sur la chaise et ouvrit le gros livre.

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Message par Dallan Mael Mer 20 Juil - 22:11

Quoi dire de sa personne assise sur le tabouret. Il est vrai que Dallan n'avait pas l'air bien fort dans sa carcasse pâle. On aurait facilement pu l'assimiler à un jeune homme malade. Mais tout de même, transparaissait un charme froid dans ses grands yeux nacres. Son visage lui-même était figé dans la glace, transcendé pour cette fois-ci, d'une moue déboussolée. Il n'avait pas la beauté des anges, à cause de cette fausse arrogance se baladant dans ses expressions absentes, ni celle des démons, ses cheveux et son être tout entier étant bien trop clairs. Son physique mis de côté, pouvait-on vraiment le dire fragile ? Peut-être pas complètement. Il était timide, c'était là son grand défaut, mais pourtant très résistant. Courageux, il se forçait à avancer encore et encore bien qu'il n'y voit rien. Et, autant il se coupait volontiers de la vie sociale, autant il avait besoin de se prouver qu'il pouvait encore se débrouiller plus ou moins seul, qu'importe la situation, la grandeur de l'inconnue. Pour arriver à Botan par contre, il était indéniable que l'Arbre l'avait aidé. Sans lui et ses racines, il n'aurait jamais pu trouver son chemin dans l'herbe et n'aurait pas fait le quart de sa route. Au moins était-il fier de sa petite escapade. Être arrivé ici, sans canne, ni une seule personne lui tenant la main, relevé de l'exploit.

Voulait-il alors de l'aide pour évoluer dans ce lieu ? Aucunement. Il appréciait trop son indépendance pour qu'un étranger vienne l'accompagner à gauche et à droite dans ses déplacements. S'il avait besoin d'en savoir plus sur une pièce, il demanderait qu'on la lui décrive. Mais s'il se trouvait perdu au milieu d'un espace vide, là... Là ça serait différent. Tout de même, il aimait sa solitude. A dire vrai, comme le pensait Botan, il avait cette espèce de fierté qu'on les handicapés. Cette hargne indescriptible à vouloir tout faire tout seul, pour ne pas inspirer la compassion, pour ne pas avoir l'air différent. C'était une belle illusion. Il finissait toujours rattrapé par sa propre faiblesse. Sa mort en était la preuve. S'il n'avait pas été aveugle, jamais son amie n'aurait eu à le guider. Et lui, ne se serait pas trouvé bêtement ralentit au milieu d'une route, un taxi en approche. Alors il s'en voulait. Au fond de lui-même, depuis qu'il avait ouvert les yeux sur ce nouvel espace, il culpabilisait. La douleur de celui qui a peur... Peur qu'elle se sente fautive.

Et comment saurait-il ce qui se passerait ensuite ? Maintenant qu'il était mort, serait-il définitivement coupé du monde des vivants ? Dallan se demandait s'il serait de toute manière, une bonne idée de connaître la suite de tout ça. Finalement, il n'avait pas envie de ressentir encore plus de mélancolie. Ses parents pleureraient forcément sa mort. Il ne voulait pas s'imaginer une telle scène. Il n'avait pas envie d'entendre le bruit des sanglots, il n'aimait pas ça. C'était trop douloureux, trop lourd pour ses épaules déjà affaissées. Cet endroit-ci, lui offrait la sérénité qu'il n'avait jamais eut. Pourquoi donc de si malheureuses réflexions prenaient encore le dessus ? Il s'inquiétait de trop et même pas pour lui, toujours pour les autres. Le bien être de ses congénères l'importait et il tombait trop facilement en empathie pour les histoires qu'ils lui contaient. Arrête se dit-il alors. Arrête donc de penser à ça, concentre toi sur l'instant.

Le problème c'est que l'instant en question, n'était qu'un silence. Allait-elle plier sous sa demande et lui décrire l'endroit, Dallan allait commencer à en douter sérieusement quand elle reprit finalement la parole. Il se montra aussitôt attentif à ce qu'elle raconta. Il s'imprégnait de sa voix, de ses dires, de l'espace à présent moins sombre. Il leva même les yeux vers le plafond, qu'elle disait rond. Les murs, il avait saisit qu'ils étaient de bois. Sous ses doigts, c'était une caresse plutôt lisse. Par contre, il baissa les yeux vers le sol. Tombé sur les livres, il n'avait pas saisit que c'était de la terre. Il se pencha automatiquement, le touchant du bout des doigts, avant de se redresser, rajoutant l'information au puzzle qui se mettait en place dans sa tête.

Il continua à bien écouter la description. S'il se concentrait assez, peut-être serait-il à même d'entendre le crépitement des flammes dans les lampions ? En tout cas, tout lui était plus clair. Il se représenta un endroit tamisé, dont il affilia l'ambiance à celle d'un salon rustique avec une cheminée et un vieil homme fumant la pipe le regard dans le vague. Botan fumait, elle pourrait presque être cet homme... Avait-elle le regard vague ? Il n'en eut pas l'impression. Son ton était trop ferme pour laisser place à un regard aussi brumeux. Dans sa tête, il la définie comme une femme allant droit au but. Ses phrases étaient précises, sans jeux de langages. Elle devait certainement bien connaître cette salle. Puis il l'entendit rire, doucement. Ses sourcils se froncèrent. Il n'y avait aucune moquerie, ça se sentait, mais il analysait. Le rire d'une habituée. De celle qui sait, qui en a déjà vu, qui ne s'en préoccupe pas. C'était un fait. Elle parlait même des livres comme s'ils étaient vivants. Était-ce le cas ? Ce lieu lui semblait de plus en plus mystique, vraiment...

Elle se leva, il l'entendit. Les livres émirent un bruissement. Il y un silence et il perçut le son de quelque chose qu'on déplace, qu'on ôte de dessous un amoncèlement. Et une chaise qu'on tire, qui émet à peine un souffle musical sur ce sol friable. Botan revint à lui. Il n'avait perdu aucune miette de ses mouvements, mis à part ses pas, si silencieux. Il fut impossible à Dallan d'évaluer la distance à laquelle elle se tenait. Il en eut juste un aperçu quand une chevelure entra en contact avec sa main, lui arrachant un frisson de surprise. C'était doux et délicat. Elle devait avoir de très beau cheveux. Cette femme l'intriguait dés lors. C'était la première personne qu'il rencontrait depuis qu'il était là. Il sentait qu'elle était importante, qu'elle connaissait beaucoup de choses. Encore une fois, il regrettait de ne pas deviner les courbes de son visage, sa carnation et tout ce qui aurait put l'aider à mettre un faciès sur ce masque lisse qu'il se représentait.

Il retint un soupir, quand elle bougea, ses cheveux s'éloignant de lui. Le regard toujours éteint et glacial, il la fixa. « Je m'appelle Dallan Mael... Et j'ai 19ans. » l'informa-t-il poliment, mais tout de même d'une voix un brin réservée. Son prénom et son nom était tout irlandais, comme transpirant de l'atmosphère mystérieuse de ce pays de la verdure. Et lui, était par sa mort, un digne représentant des fantômes des châteaux de son pays. Ô joie ! S'il avait été un fantôme, au moins aurait-il put se targuer d'aller n'importe où, sans s'inquiéter de sa cécité. Les esprits ne traversent-ils pas les murs ?

Dallan finit par se passer une main sur les yeux, machinalement, tandis qu'il réfléchissait vaguement. Elle lui demandait s'il avait des questions... Oui et non... Il n'avait pas envie d'en poser, mais fallait-il qu'il se force un peu, avant de s'handicaper tout seul ? Dieu, qu'il n'aimait pas parler, et pourtant... « Pourquoi suis-je ici ? » dit-il après un temps. Il ne savait pas comment formuler sa question. Le pourquoi n'était pas si important, vu qu'il était mort... Non, c'était plutôt, qu'est-ce que je fais ici ? Ou quel est cet endroit. Décidément, il n'était pas doué. Les yeux légèrement levés vers le haut, une moue embêté aux lèvres, il tentait de recomposer une interrgation plus potable. Mas ça ne lui inspira qu'un soupir. « Je suis obligé de poser des questions ? » demanda-t-il, avec l'impression de s'emmêler les pinceaux tout seul et pour un rien en plus.


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Message par Botan Ven 22 Juil - 22:47

    La jeune femme le regarda dans les yeux. Dans ses pauvres yeux vides. Dénués d’expression. Elle en avait vu des aveugles. Oui, même si elle n’en avait jamais vraiment côtoyé dans l’Arbre. Ce sont des personnes très solitaires généralement. Leur handicap les rend solitaires. Il n’y en avait pas eu des masses, et il n’était pas non plus fréquent d’en voir à chaque tournant de l’escalier, mais elle en avait connu pas mal. Tous avec leur lot de souffrance inspirant la pitié. Elle n’avait pas pitié de lui. Aucunement. Elle n’avait jamais eu pitié de quelqu’un ou même ressenti ce genre de sentiment envers une quelconque personne. Ce n’était pas le type de sentiment qui l’affectait. A vrai dire, il n’y avait pas beaucoup de sentiment qui l’affectait. La satisfaction, l’orgueil... Seulement des sentiments qui la touchait elle et personne d’autre. Une forme d’égoïsme naturel. Les années passés seule à rester dans un arbre vide l’ont forcé à se replier un peu sur elle-même. Mais de toute façon, même si on lui apprenait à avoir un semblable état d’esprit que la pitié, elle n’arriverait pas à le garder très longtemps. Le malheur des gens les concerne. Pas elle. Elle n’était pas là pour les plaindre, ce n’était pas sa fonction. Les personnes qui viennent ou habitent ce monde ne sont pas fait pour être plains. Bien au contraire, la chance qui leur est accordé est sans conteste. On ne choisit pas les personnes qui vont venir vivre dans l’Arbre pour l’éternité à la pelle. Cela ne représentait que quelques élus. Et même si le chagrin de l’absence des proches était présent, même si la douleur de la mort était là, on ne pouvait que se rendre compte de la chance que l’on avait. Elle ne pouvait que se rendre compte de la chance qu’ils avaient. Même si elle ne connaissait pas la mort. Enfin, vis-à-vis d’elle-même.

    En parlant de mort, elle se demandait bien comment ce petit freluquet avait fini pour débarquer ici. Un assassina, non, il était trop diffèrent de ceux qui se faisaient tuer. Un suicide. Hm, non plus, il aurait eu des séquelles. Mort naturelle ? Non, la vie n’était pas si horrible pour imposer ça à une personne déjà touchée par l’injustice. Elle se concentra un instant et fronça les sourcils. Peut-être que l’Arbre lui intimerait son moment final comme parfois. Elle ferma les yeux pendant quelques secondes et les rouvrit immédiatement avec une lueur de dégoût dans les yeux. Un accident de voiture. Quelle horreur. Il n’y avait pas pire mort pour elle. Ces choses, les voitures étaient pour la Bibliothécaire la pire des inventions humaines. Elle les avait vus, une fois, en regardant à travers un passage. Machinations diaboliques. Moche et inutile. Voilà ce que le monde humain fait de mieux. Jamais, oh oui, jamais elle n’ira dans ce monde horrible. Surtout si c’est pour se faire écraser par une de ces immondices. Elle l’avait depuis bien longtemps juré sur l’Arbre. Elle en avait vu des morts horribles. Mais celles de ce genre-là, elle ne connaissait pas pire et elle ne voulait pas connaître pire. Son regard se reporta doucement sur lui lorsqu’il lui dit son nom.

    La jeune femme déboucha la petite bouteille d’encre noire et y plongea le bout de sa plume. Elle aurait pu écrire avec un crayon. Les crayons de bois étaient rependus partout dans l’Arbre. Mais elle préférait largement écrire avec ses vieilles plumes. Cela faisait plus solennel et correspondait largement avec sa manière d’être. Pui, avec des gestes lents et précis elle écrit son nom, son prénom et son âge. Son écriture était longue et fine. Un peu comme elle. Le bruit de la plume sur le papier remplissait le vide du silence. Il avait de la chance, il avait l’honneur de commencer une nouvelle page dans le Registre. Son nom était étrange, et ne lui inspirait rien. Ce devait donc être le premier Mael qu’elle recevait ici. Elle se rappelait de tous. Et tous se rappelaient d’elle. 19 ans, c’était bien jeune pour mourir ainsi. C’était bien jeune pour devenir éternel. Mais, encore une fois, ce n’était pas elle qui décidait. Le jeune homme, qui avait maintenant un prénom, parla alors qu’elle écrivait avec attention. Elle leva les yeux vers lui tout en gardant la plume posée sur le parchemin. Il avait tellement l’air perdu. C’était déjà très dur pour un humain sans handicap de s’habituer à l’idée de monde parallèle. Alors pour un aveugle. Elle ne se l’imaginait même pas. Sa main se leva enfin du Registre et comme à chaque fois, l’Arbre murmura. La jeune femme ferma alors le gros livre et se laissa glisser un peu sur le dossier de sa chaise. Ce qu’il faisait ici. Toujours la même question.

    « Tu as été choisi. Tu as été choisi par cet Arbre qui est au-dessus de toi. Par son âme. Pourquoi, je ne sais pas. Tu le découvriras par toi-même bien plus tard. Tu vas vivre ici maintenant. Pour toujours. »

    Parfois, elle se posait la même question. Depuis toujours qu’elle se trouvait sur ce seuil, elle s’était de temps en temps demandé pourquoi elle était là. Pourquoi elle. Qu’est-ce qui l’avait différencié des autres, s’il y avait eu comparaison. Elle avait beaucoup de mal à comprendre. Et l’Arbre ne lui répondait pas. Il la laissait seule. Seule avec ses pensées. Alors elle mettait tout ça de côté. C’était mieux de ne pas y réfléchir. Même si y penser ne lui faisait pas non plus mal à l’intérieur d’elle-même, elle se sentait seule dans ses moments-là. Elle sortit de ses pensées avec un regard glacial et soupira.

    « Non, tu n’es pas obligé, c’est juste que j’ai l’habitude que les gens qui arrivent ici posent beaucoup de question. Mais si tu n’as rien à me demander, je vais le faire à ta place. Comment te sens-tu ? »
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Message par Dallan Mael Dim 24 Juil - 3:58

Oh malheureuses prunelles vides. Miroir brisé dans lequel il sera à jamais impossible de voir se refléter les pensées de son possesseur. Une Blanche-Neige pour toujours cachée et jamais massacrée, puisque la reine ne pourra jamais questionner son beau miroir. Un mal pour un bien. Chétive personne sauvée d'un oubli tragique à qui l'on a offert un nouvel univers à redécouvrir, une nouvelle vision à se créer. Les sept nains resteront pourtant fable, notre personnage préférant tout de même la solitude. A-t-il raison, a-t-il tord, la question n'est pas là, son trouble le titillant encore. Et il reste là donc, le Dallan. Si statique dessus son cercle de bois, un tabouret dans le matériaux le plus naturel que la terre eut connu. Yeux de nacres plantés comme une infirmité sur le devant de la scène, représenté par Botan, dame dont jamais il ne saura décrire le visage, il attend. Attendre quoi ? La fin. Aucunement voyons, elle n'arrivera pas. L'éternité devenue nouveau guide, empêchera le jeune handicapé à imaginer l'espace d'un instant, voir le bout du tunnel aux sombres et fugaces échos. Alors pas imprécis, à tâtons il découvrira, sans but. Âme en peine pour la solitude dans laquelle ce fier aveugle tentera de rester. Y arrivera-t-il ? Rien n'est moins sûr. L'Arbre n'est-il pas un lieu forçant les liens ? Comme des racines enchevêtrés, peut-être que quelque chose, quelqu'un même l'approchera, amorçant d'un simple salut, le début d'une amitié salutaire. Se laissant enfin entrainé dedans cette valse hypothétique, il récupéra avec un peu de chance une ultime vision de ce nouveau temple d'éternité.

La pitié deviendra comme inconnue, puisque personne ne sera sensé en éprouver pour lui. A quoi bon donc ? Il sera chanceux dans ce nouvel endroit. Enfant heureux, possédant là, une chance magnifique. Interdiction de se plaindre pourtant ! Et pourquoi ferait-il telle chose ? La culpabilité l'étreint peut-être, mais rien n'est cause de l'Arbre. Non, seul est due la faute du monde réel. Les voitures en particuliers. Instrument de sa mort. Dallan ne les aime pas non plus. Elles sont dangereuses. Leur moteur pourtant audible, ne l'informe pas de l'endroit d'où elles débarquent. Et roulant à 100 à l'heure, il est incapable de réagir. Il déteste ces tas de ferrailles si lisses sous ses doigts. Leurs courbes trop parfaites sont indéterminables. Peut-il seulement apprécier la complexité des roues et leurs renfoncements dignes d'un pentacle sorcier. En voilà un univers particulier qu'il se crée. La voiture est-elle l'esclave des magiciens ? Oui et non. Oui parce que la technologie est une magie. L'on fait fondre comme un dieu un bout de métal, le faisant rougeoyer avec des étincelles. En même temps elle ne l'est pas, car pas assez belle. Il manque l'élégance, la beauté du geste. Tout ceci ne mérite pas qu'on s'y attarde. Il faut oublier ce taxis d'allure banal, même pas jaune enfaîte. Où est donc la touche so british ? Il n'y en a pas. Et quand bien même aurait-elle apparu, que Dallan ne l'aurait vu. Se doute-t-il qu'il a été tué par un taxi ? Hum, impossible. Juste par quatre roues posées dessus une carcasse morte et dégoûtante. Et l'odeur de l'essence, désagréable fumé noir se rependra sur son corps d'humain, à moins que le par-choc, si bien résistant, ne soit à peine titillé et résiste, le laissant être immaculé de blanc.

Cette mort horrible ne sera jamais digne d'une poésie de Baudelaire. Elle sera juste le passage estropié d'une page brûlée, même pas conservée. Qui voudrait donc conter, qui aurait le courage de chanter cet abscons ? Même le prête se bornera à ne dire qu'il était juste un malheureux gamin, présent au mauvais endroit, au mauvais moment. La belle affaire ! Combien son décédés du fatum tragique ? La machina deus est en place mes amis ! Et la nature est précédée par les Parques et leur ricanements dessus ce qu'elles tissent. Aucune chance d'y échapper, de déplacer un fil de cette histoire. La chose est faite, finit, bouclée ! Tu ne reviendras jamais en arrière, à jamais coincé dans ton éternité. Une dix neuvième année précaire ! Bambin encore, pas adulte, juste atteint de l'innocence de la cécité. Protagoniste d'une tragédie tu seras là, ancrée dans le sol terreux de l'arbre à ressasser à jamais ce qui ta poussée ici. Et quelle en est la raison ? Aucune idée ! Même Botan ne le sait pas. Tu le découvriras de toi-même. Personne n'a envie de se fatiguer à ta place. Et si la vérité ne t'apparais pas petit aveugle, alors tu useras de tes autres sens. Qui sait ce que te souffleras l'Arbre au détour d'un escalier ? Mais pitié, pitié, ne t'enferme pas dans ta solitude, elle ne t'aideras pas à lire le livre de ta vie. Le braille n'est pas la clé de vie. Juste les points de ta fin. Tu ne le sais pas, ne le devine pas dans ton trouble. Et sans doute cela sera mieux pour toi.

Et Dallan se sentira chanceux, comme en convient Botan. L'Arbre, cet être mystique dont il ne devine les intentions, l'a choisis ! Parmi tant d'autres, des millions de gens morts. L'obscure situation dans laquelle il est plongée, ne doit pas entacher le piédestal sur lequel il est posé depuis son arrivé. Il lui faut juste le temps. Le temps de tout bien mettre en place, d'étoffer ses pensées et comprendre. Et enfin, lorsque la chose, l'aberration de la situation aura fait son chemin dans son esprit, là il pourra sourire pleinement, remerciant du ton inaudible du cœur, l'âme généreuse de l'Arbre. Jusque là, Dallan se devra de patienter, de gravir un à un les échelons de la connaissance, de la sagesse, tout en faisant, en apprenant surtout, à faire confiance à ceux qui l'entoure. Ah, pourvu qu'il soit tous comme cette femme, cette Botan ! A la voix si assurée et froide. Au timbre si doux et confirmé, mais aussi saturé de l'ennui d'une trop longue vie. Il faut, pour avancer des gens à la poigne de fer et d'argent. Ceux qui seront capable de ne jamais ciller sous les larmes de désespoir dont est atteint notre faible Candide. Cet échappé d'un Thunder-Ten-Tronk au patronyme des plus incertains.

Et si les questions apparaissent ! Si dans la faible lueur du bonheur, elles arrivent, farouches bestioles, riant de ce point d'interrogation. Il faudra rester fier, debout et droit comme un I. Leur dire, leur soutenir, que l'inconnu n'est pas ce qui fait le plus peur au monde. Alors elles repartirons ces questions... Et le pourquoi du comment ne sera qu'un détail que l'on balaiera de la main, comme une mouche trop attentive. Et que ne ressentira-t-il d'autre que la sérénité à ce moment ? Oh diable, peut-être aura-t-il aussi l'assurance. Qui sait, le temps a peut-être gagné en éternité, il n'est pourtant pas figé. Et aucun, non Aucun mythe tragique grec ne pourra souffler le moindre épilogue.

La dame aux cheveux aussi doux qu'une couverture de soie vint alors lui demander comment il se sentait. Assurément, le pauvre gaillard avait demandé avec la voix incertaine et presque mélodramatique, s'il se devait des poser des questions. L'ignorance est une bénédiction mes frères. Il faut en jouer, jusqu'à perdre. C'est un poker dans lequel le bluff est constant. Mais on abandonne pas. Et si les questions viennent d'elles-même, on osera poser la tierce gagnante.
Dallan lève donc les yeux, dans cet espace toujours aussi sombre qu'au début. « Comment je me sens ? » répète-t-il d'un ton proche de la rhétorique. Une moue pensive accapare son faciès fragile. « Je... Je me sens à la fois bien et mal. » Et tu te sens à répondre ce genre d'insanités ? Comment veux-tu l'informer avec aussi peu de précision ! Un effort, l'on te demande un simple effort et non de gravir l'Evrest ! Prend ton courage jeune aveugle, toi qui t'es déjà senti l'audace de venir jusque là. « Je me sens comme serein enfaîte... Quelque chose... Je ne sais pas quoi, semble me souffler que tout ira bien. » Ajoute donc une moue perplexe à ce que tu dis. Non qu'il n'y croit, c'est surtout qu'il ne sait pas. Enfant maladroit dans les mots va... On te pardonne, mais continue ton discours : « Mais en même temps je me sens perdu... Cet espace est large... » Tel un architecte, il commente, donne son point de vue d'aveugle. Et, posant une main sur ses cheveux blonds qu'il ramène en arrière, il continue. « J'ai besoin de m'y faire... Enfin de deviner les choses quoi. » et un brin d'assurance ce joint à son monologue alors qu'il pousse un léger soupir. « Mais si vous me dites que je resterai toujours, je suppose que j'aurai le temps pour ça, non ? »

Qu'il est malin, il a comprit que l'éternité été la clé ! Étrangement, ses mots ne sont emprunt d'aucune tristesse. Le monde réel lui fait d'avantage peur. Dedans l'ombre de la culpabilité plane, dangereux volatil semblable à un vautour qui l'attend les serres accrochées à un toit, pour lui dévorer le cœur et l'âme. « … A moins que tout bouge là-dedans ? » petite question pleine d'appréhension. Si l'Arbre est vivant, tout dedans peu se modifier, les salles, le sol et les murs ? Il ne sait pas, incapable de jauger de vive vue le lieu. Alors il se mord la lèvre, attendant la réponse comme si elle était celle d'un prophète. Moïse, ouvre la bouche et guide le ! Et si le prince d'Egypte t'as trop vite fichu hors de ses frontières, alors tant pis... Tant pis pour notre jeune enfant.

Dallan se redresse sur son siège précaire, s'y accrochant comme le seul point d'ancrage qu'il possède. Semblable à une petite et chétive barque de pêcheur, il craint qu'une baleine arrive et ne le fasse sombrer de nouveau dans les ténébreuses vagues de l'océan. « Enfaîte je crois que je me sens plus mal à l'aise à cause de ma cécité, que du pourquoi je suis ici... » Et il se tait soudainement à cette annonce, fermant là son brin de loquacité. Il ne faut pas en dire trop, sinon le mystère serait perdu. Et l'on sait très bien que la chambre jaune elle, n'aurait pas eut tant de succès si sa résolution était apparue à la seconde page.
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